Réponses à des mails reçus suite à mon article d’hier sur la sortie de la France de l’Europe

Certains parmi vous se sont exprimés pour réagir à mes articles et je les remercie d’avoir ainsi animé mon blog. Mais, jusqu’à présent, vous étiez globalement d’accord avec mes propositions. Suite à mon article d’hier sur l’hypothèse d’une sortie de la France de l’Europe et en particulier de la zone euro, j’ai reçu deux mails particulièrement intéressants dans la mesure où les opinions exprimées n’étaient pas les mêmes que les miennes et insistaient sur les problèmes rencontrés par la France depuis la création de l’euro le 1erjanvier 2002.

J’ai retenu dans ces réactions 2 thèmes, l’un plus anecdotique, l’autre plus de fond.

Le 1erthèmeconcerne la sortie d’une étude publiée le 28 février 19 par le Centre de politique européenne installé à Fribourg : le titre de l’étude a de quoi allécher les eurosceptiques français : « Vingt ans de l’euro : perdants et gagnants, une étude empirique ». En effet, parmi les gagnants, on trouve les Allemands dont le PIB par habitant aurait augmenté de  23 000 €, les Hollandais 21 000 €, alors que le PIB par tête des Français aurait baissé de  56 000 € et celui des Italiens de 73 000 €. Bigre, un écart de 79 000 € avec les Allemands, cela permet de faire le buzz.

Reste à savoir si l’étude est sérieuse, ce dont je doute, car les méthodes utilisées sont contestables ; pour ma démonstration, je m’appuie en particulier sur les explications données par Mathieu Plane, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) sur France Culture.

La critique principale porte sur la méthode  utilisée des « groupes témoins » où le PIB de chaque pays de la zone euro est comparé à celui de pays choisis hors zone euro :  par exemple, le PIB  de la France a été comparé à 55 % de celui de l’Australie et à 45 % de celui du Royaume Uni, ce qui est pour le moins curieux lorsque l’on sait que l’économie australienne n’a rien à voir avec celle de la France puisque c’est un pays rentier disposant d’énormes réserves minières qu’elle vend en particulier à la Chine. Le PIB de l’Allemagne, quant à lui,  est une salade originale puisqu’on y trouve en particulier 28 % du Bahreïn, les bras m’en tombent,  et ouf, il y a tout de même 36 % du Japon, 26 % du Royaume Uni et 9 ,7 % de  la Suisse. Quant à la Grèce, elle fait partie des gagnants de l’euro alors que, comme le dit Mathieu Plane, c’est le pays qui a « le plus souffert de la crise de 2008 » et qui a le taux de chômage le plus élevé de la zone euro. Il est vrai que pour les chercheurs du Centre de politique européenne, 44 % du PIB de la Grèce correspond à celui de la Barbade, le portrait craché de nos voisins Héllènes.

Je partage également le jugement de Mathieu Plane sur le fait que cette étude statistique ne prend en compte qu’une variable explicative de l’évolution du PIB, le passage à l’euro, alors que « les interactions sont beaucoup plus complexes que ça en économie » et qu’il faut « regarder toutes les interférences qu’il peut y avoir entre l’évolution des prix relatifs, la compétitivité, les taux d’intérêts des dettes publiques, le taux de change de l’euro ».

Pour terminer sur une note d’humour, ces chercheurs allemands sont-ils des mauvais élèves en histoire en ignorant qu’il n’y a pas 20 ans que l’euro existe, mais 17 ans, ou ce qui est un comble pour des statisticiens, sont-ils faibles en calcul mental ?

2èmethème : mes interlocuteurs m’ont fait remarquer qu’en entrant dans l’euro, la France s’était privée de l’usage de la dévaluation, ce qui est effectivement la réalité.

La question est de savoir si en restant en dehors de l’euro et en dévaluant, les gouvernements français auraient été plus capables d’améliorer la compétitivité de notre pays et de nos entreprises qu’avec la zone euro. J’en doute, car la dévaluation est une pratique qui engendre plutôt du laxisme que du sérieux, et la France avait besoin de sérieux. Cela n’a pas été le cas, comme je l’ai expliqué dans mon livre publié chez l’Harmattan en 2016 « Réformer la France, mission impossible ? ». Les gouvernements depuis le Président Mitterand jusqu’à François Hollande n’ont jamais eu le courage de faire les réformes nécessaires, en particulier celles des administrations, pour que la France ait une économie moderne et compétitive. De ce fait, elle n’a pas pu développer ses exportations comme il aurait fallu, car elle est restée la plupart du temps dans des produits de bas ou de moyenne gamme pour lesquels elle a été de plus en plus concurrencée par les PVD.

Le problème de la France n’est pas d’être entrée dans la zone euro, mais de ne pas avoir fait les efforts nécessaires pour améliorer la productivité et la compétitivité des entreprises. C’est en montant en gamme que, comme les Allemands, nous aurions pu accéder à des marchés où l’avance technologique aurait primé sur les questions de prix.

Rien n’est perdu, mais il y a urgence.

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2 commentaires sur “Réponses à des mails reçus suite à mon article d’hier sur la sortie de la France de l’Europe

  1. Soit l’Europe est encore en gestation (ta thèse) et ses défauts vont être corrigés progressivement (27 ans !) et donc il faut toujours plus d’Europe comme les communistes disaient que les echecs de l’URSS étaient liés aux faits que l’URSS n’était pas assez communiste.  

    Soit il faut redonner aux états nations au sein de l’Europe la possibilité de reprendre une relative autonomie entre autre monetaire  (les Allemands nous laissent totalement autonomes pour faire et payer la guerre au Mali) et permettre à chaque pays de s’associer entre pays réellement frère (le club méditerranée) et non par des accords de mafieux avec des pays qui nous haïssent et profitent de nos faiblesses pour s’enrichir. C’est une Europe confédérale des états nations .  L’exemple que tu donnes  de la PAC est un bon contre exemple. A cause de la pression de l’Europe et surtout des Anglais qui ont réussi à diminuer les aides aux paysans français qui maintenant sont devenus des pauvres endettés. Notre industrie que tu dis cheep à été il est vrai abandonnée par nos élites. Mitterrand disait : « la France sera un pays de secteur tertiaire » , il est vrai que ce n’est pas une invocation Européenne mais la bêtise d’un homme qui meprisait l’économie.

    Elle a subit une concurrence bien sûr à l’exportation lié à la surévaluation de l’euro et par ailleurs le cheep français est pour toi la cause de tout nos maux industrielles alors que Dacia qui fait du bas de gamme a sauvé Renault, il est vrai produit en Roumanie qui pourrait se faire par des accords entre pays 

    ( Général Motor et Toyota produisent en France)

    Amitiés. 

    Benoît.  

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  2. Cher Jean, ton présent article de réponses à des objections est plus technique que certains de tes articles précédents. Cela m’a donné l’occasion d’entrer un peu au sein de la science économique dont tu es un pratiquant qui a le grand mérite de présenter clairement ses explications . Tout cela m’a bien entendu bien intéressé et je ne peux que souscrire de nouveau à ce que tu exposes. Amicalement.

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